Nouveau règlement européen sur l’écoconception : qu’est-ce-que le passeport numérique produit ?

Nouveau règlement européen sur l’écoconception : qu’est-ce-que le passeport numérique produit ?

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Nouvelle étape de franchie en matière d’économie circulaire ce 12 juillet 2023, après la publication par le Parlement européen de sa décision en première lecture sur le projet de nouveau règlement européen sur l’écoconception pour des produits durables, proposé par la Commission européenne le 30 mars 2022. 

Après le Conseil de l’Union européenne, qui avait émis un avis favorable dans son orientation générale de mai 2023, les députés européens ont exprimé leur soutien au texte, et adopté un certain nombre d’amendements visant à renforcer les mesures proposées par la Commission européenne.

En attendant, la lecture du Conseil de l’UE sur les propositions du Parlement, retour sur les objectifs de ce règlement et sur l’une de ses propositions phares : la création d’un passeport numérique produit.

1 – Contexte : l’Union européenne pousse plus loin ses objectifs environnementaux

Le projet de règlement a vocation à abroger la Directive 2009/125/CE sur l’écoconception, actuellement en vigueur. Cette Directive, qui s’inscrivait dans le sixième programme d’action communautaire pour l’environnement de l’Union européenne, avait fixé un cadre commun aux États membres en matière d’écoconception des produits liés à l’énergie dans le but de réduire les impacts environnementaux et de réaliser des économies d’énergie.

Sa transposition en droit français par le décret du 28 juin 2011 et l’arrêté du 3 août 2011, avait notamment conduit à l’introduction des articles R. 224-61 à R. 224-67 dans le code de l’environnement.

Depuis 2020, l’Union européenne a renforcé sa politique environnementale et s’est engagée à atteindre de nouveaux objectifs en matière de circularité. Elle s’est ainsi dotée d’un certain nombre d’outils, entre autres :

  • Le Pacte Vert pour l’Europe visant la neutralité climatique des pays membres d’ici 2050 et une croissance économique dissociée de l’utilisation des ressources ;
  • La Stratégie Industrielle pour l’Europe de la Commission européenne, mise à jour en 2021, poursuivant l’objectif d’une “double transition” écologique et numérique, et le passage à une économie circulaire ;
  • Enfin et surtout, le Plan d’Action pour une Économie Circulaire (PAEC) mettant en place un cadre d’action pour des produits durables et valorisables, et pour la promotion de la circularité dans les processus industriels.

Dans ce cadre, la refonte de la réglementation en matière d’écoconception, ne permettant plus d’atteindre les objectifs fixés par ces textes, devenait indispensable.

En outre, il était nécessaire de répondre aux différentes critiques formulées depuis l’adoption de la Directive de 2009 dont les résultats, jugés globalement positifs, restent néanmoins limités en raison notamment de son champ d’application restreint aux produits liés à l’énergie. 

L’enjeu était donc double : étendre la portée de la Directive de 2009, et adapter les exigences d’écoconception aux nouveaux engagements de l’UE en matière de climat, d’énergie et d’économie circulaire. 

La proposition de nouveau règlement, notamment tel qu’amendée par le Parlement européen, répond à ces deux volets, auxquels s’ajoute un objectif de renforcement de l’autonomie des consommateurs dans leur participation à la transition écologique. Elle prévoit à cet effet :

  • L’extension de son champ d’application à l’ensemble des produits, à l’exception de quelques secteurs comme celui de l’alimentation ou des médicaments ;
  • La fixation d’exigences d’écoconception pour chaque groupe de produits (performance, durabilité, fiabilité, réutilisabilité, réparabilité, absence de substances préoccupantes, efficacité énergétique, teneur en matériaux recyclés, etc.) ;
  • La mise en place d’un cadre visant à interdire la destruction de certains produits de consommation invendus ;
  • La fixation d’exigences en matière d’information et la création d’un passeport numérique de produit (“passeport produit”).

Selon la Commission européenne, ce nouveau cadre pourrait permettre d’économiser 132 Mtep d’énergie primaire, soit environ 150 milliards de m³ de gaz naturel d’ici 2030.

2 – Zoom sur le passeport produit 

L’une des mesures phares du projet de règlement est la mise en place d’un passeport numérique pour chaque produit, destiné à stocker par voie électronique des informations clés relatives au produit.

Cette mesure est le corollaire de la nouvelle obligation, prévue à l’article 7 de la proposition, de faire accompagner les produits d’informations pertinentes en matière d’écoconception, et qui aura vocation à compléter les règles actuellement en vigueur ainsi que les formes non numériques de transmission d’information.

Les informations figurant dans le passeport produit devront systématiquement être fournies aux consommateurs et utilisateurs finals. Elles représentent le “strict minimum” des informations à transmettre.

La Commission européenne n’a pour l’instant pas dressé la liste exhaustive des informations qui devront figurer dans le passeport produit. Toutefois, l’annexe III de la proposition de règlement prévoit les éléments susceptibles, selon ce qui sera décidé dans les actes délégués, d’être inclus.

Il s’agit notamment : 

  • Des informations relatives à la performance, la durabilité, la composition, le potentiel de réemploi, la réparabilité ou encore l’incidence environnementale du produit ;
  • Des codes articles ou marchandises internationaux ou communautaires (GTIN, TARIC…) ;
  • De la documentation et des informations relatives à la conformité du produit obligatoires au titre de législation européenne ;
  • Des manuels d’utilisation, instructions, ou informations de sécurité obligatoires incidences environnementales ;
  • Des informations relatives au constructeur et à l’importateur.

Par ailleurs, le passeport produit sera obligatoire pour tous les produits mis sur le marché ou en service à compter de l’entrée en vigueur de la mesure. Il devra satisfaire un certain nombre d’exigences, parmi lesquelles : 

  • Être relié, par l’intermédiaire d’un support de données (on peut imaginer, par exemple, un QR code), à un identifiant unique “produit” ;
  • Être physiquement présent sur le produit, son emballage ou sa documentation ;
  • Présenter des informations fondées sur des normes ouvertes, élaborées dans un format interopérable et lisibles par machine, c’est-à-dire, facilement voire universellement accessibles par les moyens informatiques disponibles chez les consommateurs.

De même que les informations contenues de le passeport produit, un certain nombre d’éléments fondamentaux n’ont pas été fixés par la Commission européenne dans sa proposition de règlement :

  • Quels acteurs, outre les consommateurs et utilisateurs finals (c’est-à-dire, les fabricants, importateurs, distributeurs, revendeurs, réparateurs ou encore recycleurs), auront accès aux informations figurant dans le passeport produit, et à quelles informations ces acteurs auront accès ;
  • Quels acteurs pourront intégrer les informations dans le passeport produit ou mettre à jour les informations y figurant ;
  • La période pendant laquelle le passeport produit sera disponible. 

Sans ces éléments, le caractère opérationnel et les implications de cette nouvelle exigence pour les acteurs de la chaîne de valeur d’un produit sont difficiles à évaluer. En tout état de cause, ils devront être précisés, par actes délégués, une fois le règlement adopté.

3 – Conclusion

A ce stade, la mise en place d’un passeport produit apparaît comme un bon moyen de remplir les objectifs que s’est fixé l’Union européenne en termes de protection des consommateurs, d’incitation à la circularité dans les processus de production  et d’utilisation efficace des ressources. 

Selon les informations qui y figureront, il permettrait en effet aux consommateurs de faire des choix éclairés sur les produits qu’ils achètent, de mesurer (voire réduire) l’impact environnemental de leur comportement économique et de privilégier la réparation plutôt que le remplacement.  

Il permettrait également de favoriser le réemploi des produits et des matériaux à grande échelle, la traçabilité étant un généralement un enjeu et un frein majeur dans ce genre de démarches.

Il reste donc à attendre l’adoption définitive du texte et des modifications qui y seront apportées. En termes de calendrier, les premiers passeports produits ne devraient toutefois pas voir le jour avant 2024.

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Une réponse

  1. […] 💡Pour mieux comprendre le fonctionnement du passeport produit, vous pouvez lire notre article de décryptage ici : CLIQUEZ ICI. […]

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