Acteurs de l’économie circulaire : protégez votre propriété intellectuelle

Acteurs de l’économie circulaire : protégez votre propriété intellectuelle

Propriété intellectuelle économie circulaire

Vous êtes AMO, bureau d’étude, architecte, cabinet de conseil, acteur de l’EIT, et vous produisez du contenu dans le cadre des missions et marchés qui vous sont confiés ou des appels d’offres auxquels vous répondez ? Sachez qu’ils sont protégés !

Voici quelques conseils pour vous prémunir contre toute atteinte ou réagir si on vous a plagié !

1 . Quels documents sont protégés par le droit de PI ?

Le Code de la Propriété Intellectuelle (CPI), protège « toutes les œuvres de l’esprit, quels qu’en soient le genre, la forme d’expression, le mérite ou la destination »[1].

Peu importe donc la forme de l’œuvre. Sont ainsi éligibles à la protection :

  • Les livres, brochures et autres écrits littéraires, artistiques et scientifiques,
  • Les œuvres de dessin, de peinture, d’architecture,
  • Les œuvres graphiques, typographiques, les illustrations et les photographies,
  • Les plans, croquis et ouvrages plastiques relatifs l’architecture,
  • Mais également les brochures commerciales, les propositions commerciales, ou encore les réponses à appel d’offre.

Toutefois, pour bénéficier de cette protection, la jurisprudence a précisé que l’œuvre devait être originale, c’est-à-dire traduire l’empreinte de la personnalité de son auteur, ou démontrer l’effort personnalisé de l’auteur, et être sa production artistique ou intellectuelle[2].

Attention donc à correctement personnaliser vos créations (cela passe par leur composition, les choix de couleurs, de typographie, d’agencement, afin qu’elles traduisent un parti pris esthétique empreint de votre personnalité).

Si ces conditions sont réunies, cette protection par le droit d’auteur est automatique, du seul fait de sa création, sans démarche ou formalité (comme un dépôt par exemple)[3].

A RETENIR : vous détenez les droits de propriété intellectuelle sur les livrables que vous produisez.

2 . Peut-on utiliser, reproduire ou exploiter ces documents sans votre autorisation ?

La réponse est non.

Le Code de Propriété Intellectuelle est très clair : toute utilisation, reproduction ou encore exploitation de votre travail doit faire l’objet d’une cession explicite de droit de propriété intellectuelle[4].

Les conditions de validité d’une cession de droit d’auteur énoncées par le code sont d’ailleurs particulièrement strictes :

  • la cession doit être écrite,
  • chacun des droits cédés doit faire l’objet d’une mention distincte,
  • l’étendue, la destination, le territoire, la durée de la cession, le prix et le mode de rémunération doivent être précisés.

La jurisprudence opère un contrôle sévère et la non-satisfaction d’une seule de ces conditions entraîne la nullité de la cession.

A noter que l’existence ou la conclusion d’un contrat de prestation de service qui implique la création d’une œuvre de l’esprit ne fait pas échec à cette protection[5].

A RETENIR : pas de cession implicite, et pas de cession automatique !

3 . Comment réagir si le cas se présente ?

Vous avez découvert que l’un de vos clients, concurrent ou ancien partenaire réutilise votre travail ou des éléments de votre travail (comme un rapport d’étude, une proposition commerciale, des plans, des photographies…).

Juridiquement, il s’agit d’une contrefaçon, strictement interdite par le Code de la Propriété Intellectuelle[6].

Il s’agit plus précisément d’un délit, au sens pénal, qui peut être punit de trois ans d’emprisonnement et de 300 000 euros d’amende[7].

Concrètement, vous pouvez :

  • Adresser une lettre de mise en demeure au contrefacteur, l’enjoignant de cesser l’acte de contrefaçon et de réparer les préjudices subis en raison de cette contrefaçon (il conviendra de justifier ces préjudices : comme la perte d’un revenu ou le gain d’un revenu manqué – par exemple, en cas de non-attribution d’un marché).
  • En cas d’échec, demander à la juridiction civile compétente de prononcer l’interdiction des actes de contrefaçon (et potentiellement sous astreinte), le retrait et la confiscation des documents contrefaisants (par exemple, s’ils sont publiés), et vous allouer des dommages et intérêts si l’acte de contrefaçon vous a causé un préjudice.
  • Déposer plainte pour obtenir la condamnation pénale du contrefacteur.
Remarque importante   En justice, le nerf de la guerre est la preuve.   En principe, la qualité d’auteur appartient, sauf preuve contraire, à celui ou à ceux sous le nom de qui l’œuvre est rendue publique[8].   Lorsque votre travail est réutilisé par un tiers y apposant son propre nom, la situation peut être délicate.   Nos recommandations :   Conservez une preuve d’antériorité de votre création, comportant la date de création et date de première divulgation de l’œuvre (le moment où elle a été utilisée ou rendue publique pour la première fois),Conservez une preuve de transmission de cette création au contrefacteur,Conservez une preuve de la date d’utilisation de votre œuvre par le contrefacteur, Faites constater l’acte de contrefaçon (soit vous-mêmes, par exemple, par des captures d’écran, ou par un constat d’huissier – ce qui sera plus onéreux mais non contestable),En cas d’utilisation partielle de votre œuvre, comparez les deux documents pour marquer l’emprunt.  

4 . Comment prévenir ces situations ?

Etablir un contrat écrit ou des CGV

Il est indispensable de toujours encadrer vos prestations de service par un contrat, dans le meilleur des cas, que vous aurez vous-mêmes proposé (vos conditions générales de vente de service par exemple), ou a minima que vous avez négocié.

Attention à ne pas signer à l’aveugle des conditions d’achat par exemple (sur le sujet voir notre article : Que faire en cas de conflit entre vos CGV et les CGA de votre client ?).

⚠️Attention également dans le cadre des marchés publics, le CCAG Services qui est généralement contractualisé prévoit la cession des droits de PI (Chapitre 6). Vérifiez que ces modalités de cession ne vous posent pas de difficulté ou à défaut ne répondez pas à l’appel d’offres !

Inclure une clause de propriété intellectuelle

Le contrat (ou les CGV) doit nécessairement comporter une clause détaillée de propriété intellectuelle par laquelle vous décidez des droits que vous voulez ou non céder à votre client ou partenaire.

Cette clause pourra être adaptée selon les projets et les négociations. Ainsi, dans certains cas, vous pourrez être amenés à ne céder que l’utilisation du support matériel de votre création (sous la forme d’un livrable) et dans un cadre déterminé, ou encore autoriser la publication de votre création sur le site internet de votre client, ou même autoriser l’exploitation, c’est-à-dire, l’utilisation contre rémunération de votre création par votre client.

Attention également à ne pas céder vos droits de façon exclusive afin de pouvoir vous-même réutiliser votre propre travail.

Il est également conseillé de prévoir une clause précisant que les apports de méthodologie, les supports contractuels et outils standards que vous avez acquis ou développés préalablement et qui constituent vos ressources et le savoir-faire propres, ne sont pas cédés.

Enfin, n’oubliez pas que la cession des droits d’auteur n’emporte en aucun cas renonciation à votre droit moral sur votre création, c’est-à-dire, au droit au respect de son nom, de votre qualité et de votre œuvre. Ce droit est en effet perpétuel, inaliénable et imprescriptible[9].

Important : le cas de l’œuvre crée par plusieurs personnes Dans certains cas, l’œuvre aura été créée conjointement par plusieurs personnes, ce qui peut changer les règles liées à la titularité des droits d’auteur. Il s’agit des œuvres dites de collaboration, composites ou collectives[10].   Dans le cas d’un rapport corédigé par exemple, pensez à ce que votre partie soit systématiquement identifiée, ou identifiable : ajouter le nom de votre structure et éventuellement des personnes physiques rédactrices et délimitez bien votre partie.

Besoin d’aide pour bien rédiger vos contrats et protéger votre propriété intellectuelle ? Ou de mettre un demeure un contrefacteur ?

N’hésitez pas à nous contacter !


[1] Article L112-1 CPI

[2] Par exemple, la Cour d’appel de Paris a refusé le caractère original d’une brochure commerciale au motif que « qu’elle présente de façon classique les produits de la société, sans que cette présentation revête un caractère artistique alors que les photographies qui y figurent ne font que reproduire les produits proposés à la commercialisation, sans manifester de recherche esthétique. » (CA Paris, pôle 5, 6 févr. 2015, n° 14/10696).

[3] Article L111-1 CPI.

[4] Article L131-3 CPI.

[5] Article L111-1 al. 3 CPI.

[6] Articles L335-1 et suivants CPI.

[7] Article L335-2 CPI.

[8] Article L113-1 CPI.

[9] Article L121-1 CPI.

[10] Articles L113-2 et suivants CPI.

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